Bien intégrer l’IA générative dans son entreprise : l'exemple de Carrefour, Yoplait et Nestlé (2024)

Quatre étapes pour réussir

  • Créer une phase d’acculturation pour toute l’entreprise (prise de parole, intervention d’experts, etc.).
  • Générer des discussions entre les différents services.
  • Mettre à disposition la technologie ou désigner des personnes chargées de défricher les usages possibles par fonction.
  • Diffuser les cas d’usage remontés.

Fin 2022, quand OpenAI a mis en ligne ChatGPT, la puissance et les capacités d’un tel outil d’intelligence artificielle (IA) générative, entraîné sur des milliards de données, ont été révélées au grand jour. Depuis, toutes les entreprises ou presque réfléchissent à s’emparer de cette technologie, pour doper leurs performances et celles de leurs salariés. Le cabinet de conseil Gartner estime que plus de 80 % d’entre elles auront recours à l’IA générative d’ici à 2026. « Cette technologie aide à raccourcir des tâches répétitives et donc à libérer du temps pour des dossiers plus stratégiques. Elle va changer le quotidien de n’importe quelle organisation », assure Thomas Zavrosa, directeur associé de l’agence de marketing Dékuple. Pour lui, il est impératif d’intégrer ce type d’outil au sein de son entreprise, via « une phase d’acculturation », pour amener ensuite les équipes à développer des cas d’usage.

Il invite en outre à créer « une dynamique interservices » et à organiser des rencontres entre collaborateurs « pour favoriser la circulation d’informations ». C’est ce que fait Yoplait, accompagné par Dékuple. « Nous sommes dans une approche transversale et pragmatique. Une douzaine de représentants de différentes fonctions dans l’entreprise sont chargés de s’approprier les outils d’IA générative, de les promouvoir auprès de leurs équipes et de faire remonter des cas d’usage », explique Arnaud Beauval, directeur e-commerce de la marque en France.

« L’impact que cela peut avoir sur notre business est essentiel, pour déterminer ensuite les ressources humaines et financières à allouer », ajoute-t-il. L’idée est d’identifier pour quels métiers et quelles tâches en particulier l’IA générative apportera une vraie plus-value, pour y concentrer l’essentiel des efforts. « Il est préférable de partir de la stratégie de l’entreprise, pour voir comment l’IA peut concrètement aider à atteindre chacun des objectifs fixés, et éviter ainsi de trop se disperser », conseille Rodolphe Marinier, manager de transition indépendant, auparavant chez Les Mousquetaires.

Éviter le « shadow AI »

Aussi, et surtout, il est important de ne pas laisser les salariés expérimenter chacun dans leur coin ChatGPT. Car ce « shadow AI » peut entraîner des fuites de données sensibles. « Il faut édicter des règles de base quand on a recours à un outil ouvert et expliquer aux équipes dans quel cadre son utilisation s’inscrit, d’un point de vue réglementaire [respect du RGPD, Règlement général sur la protection des données, NDLR] et de la sécurité des données », prévient Thomas ­Zavrosa. Aucune information confidentielle ni personnelle ne doit être entrée dans un grand modèle de langage (LLM), comme ChatGPT. De telles données pourront ressortir lors de recherches ultérieures d’autres utilisateurs, extérieurs à l’entreprise.

80 %

des entreprises utiliseront une IA générative d’ici à 2026

Source : cabinet Gartner, 2023

Pour éviter ce risque, une organisation peut souscrire un abonnement à ChatGPT réservé à ses collaborateurs. Depuis octobre 2023, ­Nestlé France utilise NesGPT. « Il présente les mêmes fonctionnalités que ChatGPT, sans conserver aucune des données que nous lui fournissons. C’est une solution dédiée pour nous, hébergée dans notre cloud, un compte Azure chez Microsoft », assure Laura Martinez, chief digital officer de Nestlé France. Un système en vase clos donc, utilisé par 2 000 collaborateurs, sur les 10 000 que compte Nestlé dans l’Hexagone. À côté de ­NesGPT, l’entreprise a mis en place un programme d’accompagnement des salariés, pour leur expliquer ce qu’est l’IA générative et comment l’utiliser, avec des ateliers favorisant l’émergence de cas d’usage. « Nous prévoyons une deuxième série de formations par métier, afin que les RH apprennent à utiliser NesGPT pour créer plus facilement une fiche de poste, par exemple », confie Laura Martinez.

Ikea favorise aussi l’acculturation de ses salariés, pour « qu’ils comprennent ce que l’IA générative permet de faire ou pas, les opportunités qu’elle crée et les risques qu’elle comporte », détaille Christophe Cadic, directeur digital de l’entreprise en France. Elle est « un game ­changer », un grand changement, mais il faut « donner du sens à son utilisation et rassurer les collaborateurs pour qu’ils soient à l’aise avec l’outil dans une époque où tout va très vite ».

Soigner les prompts

Ikea utilise le modèle d’IA Copilot de Microsoft, où l’entreprise dispose d’une bibliothèque de prompts, des phrases courtes réutilisables et personnalisables, selon les besoins des salariés (analyse de verbatims de clients, génération d’un plan pour une réunion…). L’objectif est d’améliorer les conditions de travail, selon Christophe Cadic, ainsi que l’efficacité et le niveau d’expertise des collaborateurs. Pour cela, il faut maîtriser la rédaction de prompts, mais aussi structurer d’éventuelles données utilisées pour réentraîner un modèle d’IA, afin de bien l’adapter à l’activité de son entreprise. « Si les données envoyées à l’IA générative sont mauvaises, il y a peu de chances d’en tirer quelque chose de pertinent », souligne Charles Letaillieur, senior manager du cabinet Converteo.

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« Il est possible de récupérer et d’intégrer toutes les données produits disponibles dans les PIM [product information management, NDLR], note-t-il. C’est plus ou moins ce que nous avons fait avec le groupe Seb et d’autres acteurs du retail, pour mieux catégoriser leurs produits et améliorer leur référencement sur internet. » Par ailleurs, il faut au maximum éviter la redondance des données, « car l’IA consomme énormément d’énergie », prévient Rodolphe Marinier. Un défi qui s’ajoute au risque de fuites et au besoin de former les salariés à ces nouveaux agents conversationnels.

Zoom sur deux sociétés proactives

Les cas d’usage associés aux outils d’IA générative sont multiples et peuvent servir les salariés comme les clients finaux.

  • Yoplait.En interne, il est possible d’exploiter beaucoup de données et de demander àChatGPT« d’analyser plusieurs études et documents en même temps, sous laforme de fichiers Excel, de PDF ou de vidéos »,décrit Arnaud Beauval, directeur e-commerce deYoplait. Chez Yoplait, une douzaine dereprésentants de différentes fonctions sont chargés de s’approprier les outils d’IAgénérative, de les promouvoir auprès deleurs équipes et de faire remonter descas d’usage possibles pertinents.
  • Carrefour.En octobre2023, le distributeur a lancé Askia, un chatbot répondant aux demandes de ses 80 000salariés.« Cet assistantRH répond aux principales demandes quotidiennes : comment se faire rembourser son passe Navigo ? comment recevoir ses titres-restaurant ? qu’est-ce que l’épargne salariale ?… », avait détaillé Nicolas Safis, directeur innovation groupe chez Carrefour, lors de la sortie de l’outil, intégrant aussi des modules de formation.
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